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Borislehachoir

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Envoyé par Borislehachoir le Vendredi 30 Novembre 2012 à 16:09


Plus, euh, " stable " ? Burkett ? Tu as entendu l'anecdote de l'ouvrier là quand il lui a collé un flingue sur la tête et a appuyé sur la détente ? Ce type est ultraviolent et je préfère passer la journée avec Scyth plutôt que de croiser son chemin. Et dire qu'il veut faire " cinquante enfants " ( sic ) c'est plus de l'irresponsabilité à ce stade mais de la folie totale. 

J'ai trouvé l'histoire assez simple moi, le problème est que tu as pris sans recul les versions absolument irréalistes racontées par les tueurs. Burkett n'a évidemment pas fait que se réveiller dans une voiture, c'est un mythomane ( l'autre aussi ) et il était chargé de distraire la victime pendant que son pote l'assassinait. Tout ce qu'il raconte est bidon et je ne comprends pas comment tu as pu prendre ça au sérieux.

Puis si ils se connaissaient tous les deux ( Perry et Burkett ), Burkett explique que l'autre a vécu chez lui durant un temps. Ils ont tué la bonne femme pour avoir la voiture, c'était le jeune garçon blond qui avait les clés du garage visiblement donc ils l'ont tué aussi avec son pote - celui qui a tenté de s'enfuir dans la forêt - mais eux n'avaient rien à voir dans tout ça. Pour les deux voitures je ne me souviens pas avoir entendu ça, ils se sont contenté de frimer - comme deux abrutis - avec la caisse de la bonne femme qu'ils ont assassiné. 

Pour moi ce sont deux ordures. Ils tuent trois personnes pour une bagnole, et même pas par besoin vital mais pour frimer avec. Ils s'accusent l'un l'autre, ils n'ont pas un putain de mot de compassion pour les victimes, ils nient totalement leur responsabilité. Je suis pas un grand fanatique de la prison mais trouver la peine sévère pour un triple homicide sans la moindre circonstance atténuante, avec préméditation et tout euh... Regarde Burkett, ce type n'a pas changé et ne changera probablement pas, il va juste faire des gosses qu'on retrouvera en prison dans vingt ans. 

Boris, je crois quand même qu'il y a un certain nombre d'éléments que tu as très mal compris.

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jokerface

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Envoyé par jokerface le Vendredi 30 Novembre 2012 à 16:40


Plus, euh, " stable " ? Burkett ? Tu as entendu l'anecdote de l'ouvrier là quand il lui a collé un flingue sur la tête et a appuyé sur la détente ? Ce type est ultraviolent et je préfère passer la journée avec Scyth plutôt que de croiser son chemin. Et dire qu'il veut faire " cinquante enfants " ( sic ) c'est plus de l'irresponsabilité à ce stade mais de la folie totale.

Non mais je veux dire après sa peine. Visiblement quand il se fait interviewé il a deja fait pas mal d'années et il a l'air d'avoir un peu plus réfléchi. Les deux en fait.

J'ai trouvé l'histoire assez simple moi, le problème est que tu as pris sans recul les versions absolument irréalistes racontées par les tueurs. Burkett n'a évidemment pas fait que se réveiller dans une voiture, c'est un mythomane ( l'autre aussi ) et il était chargé de distraire la victime pendant que son pote l'assassinait. Tout ce qu'il raconte est bidon et je ne comprends pas comment tu as pu prendre ça au sérieux.
 
Ben...ya eu (normalement) une enquête qui a été faite. Le journaliste on peut supposer qu'il s'est renseigné un minimum sur les faits avant de se faire son reportage. Donc quand je vois l'autre dire qu'il dormait dans la caisse et que rien, ni les flics ni le réalisateur viennent clairement dire le contraire, je pars du principe que c'est vrai. Si après le témoignage de Burkett on avait eu une voix off dire un truc style "on a retrouvé les cheveux de Burkettsur la victime " ça aurait démenti, mais là rien. Le journaliste réagit pas à ce que dit Burkett. Alors si le but c'etait de laisser le spectateur se faire une opinion sur ce que dit Burkett, alors là ok, dans ce cas je garde une réserve et j'admet sans problème que ça sent le dégagement de responsabilité. Mais si c'est pas le cas, alors vu que rien ne vient démentir sa version, je vois pas pourquoi il faudrait pas le croire. C'est pas clair tout ça.

Ils ont tué la bonne femme pour avoir la voiture, c'était le jeune garçon blond qui avait les clés du garage visiblement donc ils l'ont tué aussi avec son pote - celui qui a tenté de s'enfuir dans la forêt - mais eux n'avaient rien à voir dans tout ça.
Mais eux , le blond et son pote, ils foutaient quoi là bas ?

Pour les deux voitures je ne me souviens pas avoir entendu ça, ils se sont contenté de frimer - comme deux abrutis - avec la caisse de la bonne femme qu'ils ont assassiné.

Il y avait bien deux voitures. Ils ont dis avoir gagnés "les voitures" à la loterie. Le journaliste interview aussi une blonde qui affirme avoir roulés dedans. Elle dit aussi que c'etait bizarre parce que les voitures ne semblaient pas venir d'un lot. Si tu veux je te screen le passage. Mais du coup je vois pas de quelle autre voiture il peut s'agir, a part la rouge (la blanche  fracassée contre l'immeuble peut être ? Ou la noire qui etait criblée de balles ? Erf, ca fait 3 voitures du coup, ou alors la noire cest celle des flics).
Pour moi ce sont deux ordures. Ils tuent trois personnes pour une bagnole, et même pas par besoin vital mais pour frimer avec. Ils s'accusent l'un l'autre, ils n'ont pas un putain de mot de compassion pour les victimes, ils nient totalement leur responsabilité. Je suis pas un grand fanatique de la prison mais trouver la peine sévère pour un triple homicide sans la moindre circonstance atténuante, avec préméditation et tout euh... Regarde Burkett, ce type n'a pas changé et ne changera probablement pas, il va juste faire des gosses qu'on retrouvera en prison dans vingt ans.
 

Faut pas perdre de vu qu'ils etaient mômes quand c'est arrivé. Je me fais l'avocat du diable (alors que d'habitude je suis le premier à chier sur les antécédents), mais apparemment yen avait un des deux sous drogue et alcool + sans abri = perte de répère. En fait, le témoignage de l'ouvrier montre un truc : il est content d'avoir après à lire...en prison.  Et le père qui a toujours été absent, il a pu fêter Thanksgiving avec ses fils...en prison.

Du coup la prison passe pour un endroit qui redonne des règles et des repères à ceux qui les ont perdus. Je dis pas si c'est bien ou mal, mais mon sentiment c'est que leur place est là bas, en tôle oui , car ils doivent payer pour ce qu'ils ont fait, mais aussi parce que ça leur permet d'avoir "une structure" où ils peuvent :
-Avoir un toit
-Manger à leur faim
-Ne pas être sous dépendance (dans une certaine mesure)
-Ne pas faire de conneries
-Se retrouver... d'où l'anedcote du père avec ses fils, mais aussi des femmes qui etablissent une relation avec les condamnés.

Du coup la peine d'emprisonnement est vue comme une façon de "réabiliter" les gens . Contrairement à la peine de mort qui ne fait rien d'autre que les tuer.

 

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Le 23/02/2017 à 16:10, David avait écrit ...

Mon papa me disait : "on n'écrase par les fourmis, fils"

Borislehachoir

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Envoyé par Borislehachoir le Vendredi 30 Novembre 2012 à 18:47


Non mais je veux dire après sa peine. Visiblement quand il se fait interviewé il a deja fait pas mal d'années et il a l'air d'avoir un peu plus réfléchi. Les deux en fait.

Je ne vois rien dans son attitude qui indique une prise de conscience, bien au contraire. 

en...ya eu (normalement) une enquête qui a été faite. Le journaliste on peut supposer qu'il s'est renseigné un minimum sur les faits avant de se faire son reportage. Donc quand je vois l'autre dire qu'il dormait dans la caisse et que rien, ni les flics ni le réalisateur viennent clairement dire le contraire, je pars du principe que c'est vrai. Si après le témoignage de Burkett on avait eu une voix off dire un truc style "on a retrouvé les cheveux de Burkettsur la victime " ça aurait démenti, mais là rien. Le journaliste réagit pas à ce que dit Burkett. Alors si le but c'etait de laisser le spectateur se faire une opinion sur ce que dit Burkett, alors là ok, dans ce cas je garde une réserve et j'admet sans problème que ça sent le dégagement de responsabilité. Mais si c'est pas le cas, alors vu que rien ne vient démentir sa version, je vois pas pourquoi il faudrait pas le croire. C'est pas clair tout ça.

C'est pas clair pour toi parce que tu veux qu'on t'explique tout. Herzog est pas là pour prendre son spectateur par la main et lui dire ce qu'il faut penser. Quand il interroge Perry et Burkett, il me semble clair comme de l'eau de roche qu'ils mentent et que leurs versions sont une accumulation d'incohérences ; il y a des témoins qui les ont entendu se vanter, il y a la voiture de la victime qui était en leur possession, il y a le propre père de Burkett qui JAMAIS ne remet en question la culpabilité de son fils. 
Même la propre femme de Burkett dit en substance " il n'est pas le tueur " tout en sous-entendant clairement qu'il est dans le coup. De toute évidence, elle pense que Perry a fait le coup et que Burkett y a été mélé sans le vouloir. En tout cas il y a une seule personne qui trouve la version de Burkett crédible : lui-même.
Mais eux , le blond et son pote, ils foutaient quoi là bas ?

Le blond est le fils de la femme assassinée, me semble.
Il y avait bien deux voitures. Ils ont dis avoir gagnés "les voitures" à la loterie.

Peut-être y avait-il une deuxième voiture dans le garage qu'ils ont volé en même temps. Je re-regarderai le docu la semaine prochaine pour éclaircir ce point.

Ce que tu dis sur la prison contient une part de vérité mais n'oublie pas une chose : Burkett est le frère d'un homme qui a passé en prison, et le frère d'un homme qui a passé sa vie en prison ; lui-même passera sa vie en prison. Quelle vie va t-il offrir à son fils ? Qu'est ce que ce mec peut apporter de positif à son gosse ?

Boris.


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corum

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Envoyé par corum le Mardi 04 Décembre 2012 à 21:18


Tout d'abord je suis d'accord avec Boris sur le Herzog. Sinon une seule chronique mais un peu plus longue que d'habitude et écrite sous l'influence d'une excellente bière bavaroise (Munchen ist schön) à une heure indue. Dites moi ce que vous en pensez.

Satantango (Bela Tarr)
Au beau milieu de la plaine hongroise, vers la fin du régime communiste, la petite communauté d'une ferme collective s'espionne, complote et se désespère. On annonce alors le retour d'Irimias que l'on croyait mort. Son retour coincide avec un événement tragique...

Ce film bénéficie tout d'abord d'une structure narrative très complexe. Il est divisé en 12 parties. Les 6 premières relatent une même journée du point de vue de cinq personnes différentes et se conclut par le drame central. Un rassemblement des points de vue s'effectue alors et la seconde journée n'est vue que de deux points de vue, à un intermède près. Finalement, dans un dernier retour, le récit se referme sur lui-même, donnant son sens au titre du film (6 pas en avant et 6 pas en arrière du tango).
Cette structure est en parfaite adéquation avec le propos du film : l'unification de cette comunauté autour de son prophète "Jérémie", puis son morcellement par sa volonté ; ou bien encorela réalité du changement introduit par le capitalisme et les espoirs brisés de cette communauté. Elle met également en exergue le mouvement de la vie selon Tarr, du tintement mystérieux des cloches à la nuit profonde de la fin du film, en forme d'enterrement.

La deuxième particularité du film explique, ou s'explique par, à vous de voir, la longueur du film. Celui-ci dure en effet 7h30 (pour anticiper une question évidente, j'ai regardé le film en une fois si l'on excepte 30min au milieu pour me faire cuire des pâtes). Ceci est dû non seulement au temps de narration général, mais également au traitement de chaque scène et du temps, le rythme recherché étant un rythme proche de la vie.
Ainsi de cette scène du "tango de Satan" où les personnages dansent interminablement sur le même court motif toujours recommencé. Un des personnages répète sans arrête le même discours incohérent et sans intérêt. La déchéance humaine, l'état d'esprit engendré par l'alcool et le désespoir ont rarement été si palpables.
Plus remarquable encore est peut-être ce passage où la caméra suit les déambulations d'un alcoolique. Onalterne alors entre de longs travelling où l'on suit le marcheur errant dans la nuit, des moments de black out figuré par des ellipses dans la force est ampliflié par la longueur du reste, le tout entrecoupé de visions presqu'hallucinées, dont celle d'Irimias.

Un autre aspect auquel s'intéresse Tarr sont ces moments que non seulement le cinéma, mais notre attention et notre conscience délaissent. Ces longs silences, ces moments hors narration, cette cuisine laisée vide par le départ des personnages mais que la caméra peut-elle surprendre, miracle matérialiste s'il en est exercent une vraie fascination. On peut penser également à ses longs travellings qui suivent les personnages de dos, la plus belle scène du film étant peut-être ce moment où la caméra suit Irimias et son compagnon pendant plusieurs minutes sous cette omniprésente pluie et se prenant les pieds dans des déchets que le vent les fait suivre.
On retrouve également ces longs plans séquences très complexes cher à Tarr dans les scènes à plusieurs personnages, la caméra semble alors les enlacer. Ceci dit ceux-ci sont sans doute moins maitrisés que dans Les Harmonies Weirckmeister, même s'ils restend de très beaux moments de cinéma.
Reste à noter deux plans inoubliables. Le premier est un long travelling dans cette misérable campagne hongroise où la beauté qui semblait si étrangère à ce monde surgit soudain et nous frappe au visage. Incroyable.
Le second est le plan séquence pré-générique qui ouvre le film. On y suit un troupeau de vache pendant environ 8 minutes, de sa sortie de l'étable à son voyage à travers la ferme délabrée. Si ce plan a comme on le comprend plus tard un sens narratif important, mais est également une annonce de l'esthétique du film. A sa façon se plan est extrêmement impressionant tant il semble miraculeux que la caméra puisse suivre le rythme hasardeux de ses vaches à travers les bâtiments. Tout ceci fait de ce plan quelque chose de presque magique, pourtant il n'est rien de plus matérialiste.

Peut-on réellement se risquer à parler de chef-d'oeuvre pour un film à l'esthétique et à la narration si particulière ? Je ne le sais pas, toujours est-il que je suis heureux qu'un tel film ait pu être fait et encore plus de l'avoir vu.

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"car le style pour l'écrivain aussi bien que la couleur pour le peintre est une question non de technique mais de vision" Marcel Proust

Borislehachoir

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Envoyé par Borislehachoir le Mardi 11 Décembre 2012 à 02:35


Bon, j'ai une mauvaise et une bonne nouvelle.

Je reçois des millions de mails enflammés qui me disent " merci boris pour tes superbes critiques de blaxploitation, depuis que j'ai vu Coffy, je ne regarde plus les saladiers de la même façon ". Malheureusement j'épuise petit à petit mon stock et ne voulant pas payer un euro pour les voir n'ayant pas un portefeuille extensible j'arrêterai probablement ces critiques extrêmement demandées bientôt. Je sais que des centaines de membres de MC seront dégouté de ne pas savoir ce que je pense de " Blackenstein, le Frankenstein noir " mais je vous demande de respecter ma décision.

Toutefois, j'ai quand même de quoi vous faire plaisir.

Car mes chroniques de films de monstres tout pourraves vont reprendre ! En effet, un certain blog possède l'intégralité de ceux qui me manquaient dans les années 30-40, c'est-à-dire les suites de la Momie ( la Tombe de la Momie, la Main de la Momie, le Fantôme de la Momie... ) et de l'Homme invisible ( Le Retour de l'homme invisible, la Femme invisible ). Ca a l'air vachement bien.

Boris, en plus y a Lon Chaney Jr, alias le pire acteur de tous les temps après Steven Seagal, dans les 3/4 de ces films.

 

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corum

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Envoyé par corum le Mardi 11 Décembre 2012 à 02:38


Je suis à la fois triste et heureux, ou heureux et triste, à toi de décider

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"car le style pour l'écrivain aussi bien que la couleur pour le peintre est une question non de technique mais de vision" Marcel Proust

Borislehachoir

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Envoyé par Borislehachoir le Mercredi 19 Décembre 2012 à 13:06


Enquête sur un citoyen au dessus de tout soupçon ( Elio Petri, 1970 )

Le chef de la section criminelle ( Gian Maria Volonté ) assassine sa maîtresse puis laisse en évidence des preuves destinées à l’accuser. Il cherche ainsi à prouver qu’en tant qu’élément indispensable du système répressif, il lui est impossible d’être accusé d’un crime.
Point de départ absolument génial pour ce film d’un ami de Sergio Leone et militant gauchiste ; on pourrait presque parler de procès de Kafka inversé puisque là ou le héros du génial écrivain tchèque était coupable aux yeux du monde sans savoir pourquoi, ici le personnage de Gian Maria Volonte sera toujours innocent pour le système tout en cherchant à prouver qu’il ne l’est pas. Le scénario assume totalement son point de départ et se sert très intelligemment du contexte politique liées à la subversion étudiante en évitant le manichéisme : ainsi, l’étudiant gauchisant témoin du meurtre préfère se taire pour faire du chantage au héros, montrant que même les éléments se disant étrangers au système partagent sa logique implacable.
En plus de ce captivant canevas scénaristique, le film de Petri peut compter sur deux atouts évidents qui firent également les beaux jours de son ami Leone : d’abord, une excellente musique d’Ennio Morricone ( sans doute l’un de ses thèmes les plus connus ), et ensuite, une extraordinaire interprétation de cet acteur fiévreux qu’est Gian Maria Volonte, sans doute une des plus remarquables d’une carrière pourtant pas avare en grands films. J’aime aussi énormément la façon dont l’intrigue devient de plus en plus non-sensique au fur et à mesure de son déroulement, jusqu’à s’achever dans le grand n’importe quoi.
Deux défauts à mes yeux. D’abord, je trouve Petri assez peu convaincant en temps que styliste et la mise en scène m’est apparue imprécise voir brouillonne a plusieurs moments, le côté très heurté du cinéma des années 70 lui convenant moins que les meilleurs cinéastes américains de l’époque par exemple. Ensuite, comme tout cinéma a but politique et en dépit de ses extraordinaires qualités, il tombe parfois dans le didactisme et notamment lors d’une scène finale qui explicite totalement ce qui avait été pourtant subtilement suggéré jusque là. Donc pas un chef d’œuvre à mes yeux mais un excellent thriller politique qui devrait notamment plaire aux plus littéraires des membres du forum.








Dynamite Jones ( Jack Starrett, 1973 )

Cleopatra Jones ( Tamara Dobson ) est un agent fédéral plutôt canon qui affronte la terrible Mummy ( Shelley Winters ).
On avait déjà vu des blaxploitation tapant dans le film de gangster au rabais ( Black Caesar ), voici maintenant le James Bond black au féminin avec son héroïne roulant dans une superbe bagnole avec tout plein de flingues et de gadgets qui se bat contre des méchants absolument ridicules dotés des pires coupes de cheveux possibles, même dans les années 70. Trônant au-dessus de tout ça, Shelley Winters ( la maman de Lolita ), affublée d’une incroyable perruque d’Yvette Horner, joue la méchante lesbienne de service à l’aide d’un cabotinage qui ferait passer les derniers films de Nicolas Cage pour du Bergman. C’est débile mais ça a le mérite d’être drôle.
Si Tamara Dobson est indiscutablement une bombe, elle manque de l’expressivité d’une Pam Grier et peine à attacher à son personnage, d’ailleurs sans grand intérêt. Celui qui tire son épingle du jeu est plutôt l’inévitable Antonio " Huggy les bons tuyaux " Fargas, également en roue libre en gangster minable obsédé par sa chevelure, mais pourtant saisissant de magnétisme.
Est-ce que ce Dynamite Jones est complètement nul ? Pas vraiment. La course-poursuite en bagnole centrale dans Los Angeles, par exemple, est très bien filmée et montée. Sans génie, le réalisateur arrive à peu près à créer des fusillades correctes et en dépit d’une histoire vraiment écrite en deux minutes sur un coin de table, ce Dynamite Jones se regarde comme un petit plaisir coupable, d’autant plus que Tarama Dobson nous gratifie de quelques décolletés vertigineux pour le moins agréables.
Pour finir, au moment ou j’écris je ne connais pas la couleur de peau de Jack Starrett mais je serais prêt à parier qu’il est blanc. De film en film, je commence à voir l’importante différence entre les blaxploitation réalisés par des noirs et par des blancs, les premiers étant beaucoup plus radicaux dans leur propos. Ici, terminer le film par le patron blanc de Tamara Dobson qui serre le poing avec les habituels wanna-be Black Panthers me semble typiquement le genre de procédés particulièrement hypocrites dont les réalisateurs blancs sont assez coutumiers.
Un mauvais film, mais encore regardable. Ceci dit, ce n’est guère pire que les James Bond avec Roger Moore réalisés à la même époque - c’est même un peu moins ennuyeux -.

Les Trois Lumières ( Fritz Lang, 1921 )

Deux amoureux sans nom ( Lili Dagover et Walter Janssen ) rencontrent la Mort qui emporte l’homme. La jeune femme supplie celle-ci de lui rendre son fiancée, ce que la Mort n’accepte qu’à condition qu’elle sauve une des lumières en train de s’éteindre, c’est-à-dire une vie. Elle va alors voyager au sein des époques et des lieux, avec pour but de sauver à chaque fois un homme condamné.
Prétexte scénaristique pour délivrer trois longues séquences exotiques ( Bagdad sous le califat, Venise du temps de sa splendeur puis la cour de l’empereur de Chine ), Les Trois Lumières fait partie des contributions de Fritz Lang à l’expressionnisme allemand pour laquelle il bénéficia d’un important budget, avec pour contrecoup une exécution assez impersonnelle, loin des thèmes fétiches de Lang ( la culpabilité, l’ambiguïté de la nature humaine ) et directement issue de la tradition romantique allemande.
Comment juger aujourd’hui un film bientôt centenaire ? On pourra au choix être sceptique devant le simplisme de l’histoire et le caractère excessivement cliché des passages exotiques ( empereur chinois cruel, musulmans fanatiques, intrigue de carnaval à Venise ) mais aussi admiratif devant la splendeur visuelle du film ( l’antre de la Mort est sublime ) et le sens du rythme de Lang. De plus, la structure qui nous balade d'époques en époques offre un dépaysement constant et à peine aurait-on le temps de commencer à se lasser d'une histoire qu'on passe à une autre, gagnant en plaisir ce qu'on perd en profondeur thématique ou en subtilité.
Au-delà de ses aspects simplistes, les Trois Lumières a néanmoins fait date, chose qu’on tend à oublier aujourd’hui, la postérité ayant retenu bien d’autres - meilleures - œuvres du cinéastes. Inspiration de Bergman pour le Septième sceau pour sa représentation de la mort mais aussi de Bunuel et évidemment d’Hitchcock, il se regarde encore en 2012 avec un plaisir certain.
Pas de captures car vu au cinéma de minuit sur France 3.

Black Rainbow ( Mike Hodges, 1989 )

Walter Travis ( Jason Robards ) sillonne les Etats-Unis avec sa fille Martha ( Rosanna Arquette ), vivant des dons de voyance simulés par celle-ci. Lors d’un spectacle, Martha voit réellement un meurtre, qui se produit peu de temps après.
Quelle étrange carrière que celle de Mike Hodges, carrière dont je n’ai toujours pas fait le tour mais qui m’intéresse particulièrement. C’est peut-être l’un des films ou il est le plus brillant comme metteur en scène, les scènes de voyance étant notamment portées par des travellings assez somptueux. Comme toujours chez le cinéaste, le scénario de thriller cache une critique sociale ( sur le rôle de la religion et le capitalisme notamment ), pas d’une grande originalité mais assez finement construite. Et Rosanna Arquette était vraiment splendide.
Cependant, le film ne me convainc pas sur la durée. Comme la grande majorité des réalisations de Hodges, il est trop long et le film accuse un énorme coup de mou durant son milieu, peinant à captiver entre deux scènes de voyance. Hodges a également opté pour une fin… originale, clairement difficile à anticiper mais aussi très frustrante puisque le spectateur peut avoir la légère impression d’un film qui promet beaucoup pour au final n’arriver nulle part. A cet égard le structure en flash-back me semble peu pertinente puisque l’histoire n’admet de toute façon pas plus de conclusion réelle après le flash-back qu’avant. Et si Robards et Arquette jouent bien, je pense qu’il aurait fallu qu’ils soient vraiment extraordinaires pour que le film soit inoubliable. Enfin il me semble que le mélange fantastique-thriller-critique sociale peine parfois à bien s'articuler, notamment la partie thriller autour d'un patron d'usine véreux qui n'apporte vraiment pas grand chose d'intéressant au film. 
Ceci dit, les gros points faibles du film sont aussi ce qui font sa singularité : indiscutablement, Black Rainbow est un film personnel et atypique. Il faut saluer son ambition, surtout pour un film à budget aussi faible, mais en dépit de fulgurances par moments je n'ai pas été convaincu sur la longueur.

Pour la route, mon top Mike Hodges :

Chef d'oeuvre :

1 - Get Carter/La loi du milieu

Excellents :

2 - Seule la mort peut m'arrêter
3 - Croupier ( critiqué ici )

Bancal mais intéressant :

4 - Black Rainbow ( critiqué ici )

Médiocre :

5 - Pulp /Retraite mortelle ( critiqué ici )

Mauvais :

6 - L'Irlandais




The Nickel Ride ( Robert Mulligan, 1974 )

Cooper ( Jason Miller ) est un mafieux au rôle exact difficile à percevoir. Petit à petit, une suite d’évènements lui laissent penser qu’on cherche à se débarrasser de lui, notamment lorsque son supérieur lui impose la présence d’un jeune voyou ambitieux à ses côtés.
Film très intéressant et très complexe à analyser, puisqu’à l’instar de quelques chefs d’œuvre du cinéma parano de l’époque ( Le Locataire de Polanski, Conversation secrète de Coppola ), The Nickel Ride joue sur les micro-signes, les petits éléments de rien du tout qui réunis forment un climat très angoissant. En plaçant le film entièrement sous regard de son personnage principal, Mulligan prend un risque payant ; en effet l’interprétation de Jason Miller m’a semblé aussi brillante que sobre. L’écriture scénaristique évite toutes les caractérisations hâtives propres aux genres et Cooper, ni héros ni anti-héros, est un être complexe : mafieux mais époux aimant, menaçant mais populaire dans sa ville, angoissé mais digne. Je pense que pour un scénariste, c’est l’enfer sur terre que de décrire un personnages de ce type parce qu’il échappe totalement aux gimmicks et aux habitudes du spectateur qui inconsciemment aime savoir rapidement de quoi il en retourne.
The Nickel Ride est aussi un film sur le vieillissement, sur le sentiment de voir notre monde nous échapper et de devenir étranger à notre propre rôle social - ce n’est sans doute pas un hasard si à l’occasion de l’anniversaire de Cooper, on lui offre une montre et une horloge -. Il s’inscrit dans son époque aussi bien thématiquement que formellement puisque la mise en scène fait beaucoup penser au Scorsese de Mean Streets, voir à du Cassavetes, mais n’a absolument pas vieilli. Peut-être est-ce de la surinterprétation, le film s’y prêtant forcément beaucoup, mais The Nickel Ride ne me semble absolument pas être un film sur la mafia, celle-ci pouvant très bien être remplacée par n’importe quel travail un tant soit peu aliénant. The Nickel Ride est l’histoire d’un homme qui se révolte sans espoir de vaincre contre son environnement, et c’est une très belle histoire et un grand film qui loin d’être théorique est au contraire très intimiste et très attaché à son personnage principal.
Un très grand merci à Jean-Baptiste Thoret pour être l’un des rares critiques à lui avoir consacré une analyse ( plusieurs autres films critiqués ici lui doivent également beaucoup ), et à Patrick Brion pour avoir diffusé cette rareté au cinéma de minuit. Il se trouve désormais sur le site smartorrent.
Malheureusement, toujours de captures car vu à la télé.

Boris.

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corum

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Envoyé par corum le Jeudi 20 Décembre 2012 à 17:59


Van Gogh (Maurice Pialat)
Les trois derniers mois de la vie de Vincent Van Gogh, sa relation avec son frère, son médecin, le docteur Gachet, la fille de celui-ci...
Van Gogh est un film étonnant. Sur un tel sujet, beaucoup de choses auraient pu être faite, du mélodrame au film sur la peinture. Pialat s'en moque. Les tableaux, ils sont à peine montrés, souvent de loin. 2-3 scènes de peinture, et encore, l'une d'entre elle s'intéresse plus à sa relation avec Marguerite Gachet qu'à ses méthodes de peinture. Pialat n'est pas là pour exalter l'art, et c'est tant mieux. Ce qui l'intéresse c'est le personnage Van Gogh, son moi social, la raison et les conséquence de ses folies. Le regard que la société porte sur cet artiste, ce parasite, peut-être un génie.

Et là, soyons clair, le film est une réussite totale. Avant out, chaque acteur est absolument parfait. Vraiment. Les dialogues sont parfaitement écrit (c'est à dire pas trop écrit). Les choix de décor sont également excellent, ce qui concourt à faire de ce film une véritable recréation de l'époque. Et au sommet, un Jacques Dutronc absolument incroyable.

Pour moi, tout est réussi dans ce film. Quelques scènes se détachent : les colères de Van Gogh, surtout face à son frère, pendant un repas, cette scène où il se jette soudainement dans la rivière, le passage dans le bordel, hymne à la sensualité et à la vie sans aucun lyrisme, la façon dont Pialat filme la mort de Van Gogh, l'épilogue, tout bonnement génial...

Bref, un film immense, un des préférés de Boris d'ailleurs, que vous devriez courir voir.

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Borislehachoir

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Envoyé par Borislehachoir le Samedi 29 Décembre 2012 à 20:37


Deux decès qui viennent aussi symboliser la fin d'une époque.

Harry Carey Jr, acteur que j'avais beaucoup apprécié chez John Ford ( le convoi des braves, un de mes films favoris du cinéaste ) et dans mon Allan Dwan préferé ( Quatre étrange cavaliers ) restait une des dernières figures du western classique. 

Décès également de Jack Klugman, le sympathique gars du ghetto dans 12 hommes en colère, qui était le dernier survivant du casting. Si environ la moitié des douze salopards se porte bien, notons qu'un seul des 7 mercenaires est encore en vie ( Robert Vaughn ) et que le méchant du film, Eli Wallach, est bien parti pour enterrer toute l'équipe.

Boris.

 

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Envoyé par psychatogmaster le Lundi 31 Décembre 2012 à 05:08


 Je vient de regarder mémoires d'une geisha, le seul truc que j'ai appris c'est qu'offrir une glace a une gamine peut être un investissement à long terme  :D


BenP

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Envoyé par BenP le Mercredi 02 Janvier 2013 à 05:36


Le 31/12/2012 à 05:08, psychatogmaster avait écrit ...

Je vient de regarder mémoires d'une geisha, le seul truc que j'ai appris c'est qu'offrir une glace a une gamine peut être un investissement à long terme  :D


Quand tu t'appelles Jokerface, tu consideres cela comme un investissement tout court.

Sinon, j'ai vu The Hobbit et j'ai plutot ete decu par le film. J'ai apprecie la scene de Gollum, les chants des nains, certaines scenes de combat (pas toutes), et on a quand meme envie de voir ce que ca va donner avec le necromancien (seul ajout au livre qui vaille vraiment le coup a priori). Mais pour le reste, il y avait beaucoup trop d'invraisemblances pour que je reste accroche.

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Envoyé par Borislehachoir le Mercredi 02 Janvier 2013 à 12:07


Je déteste poster en bas de page.

Boris.

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Envoyé par jokerface le Mercredi 02 Janvier 2013 à 12:33


Le 02/01/2013 à 05:36, BenP avait écrit ...


Quand tu t'appelles Jokerface, tu consideres cela comme un investissement tout court.


 


Va mourir pourceau.

Le 02/01/2013 à 12:07, Borislehachoir avait écrit ...

Je déteste poster en bas de page.

Boris.
 



Et moi en tête de page suivante.

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Le 23/02/2017 à 16:10, David avait écrit ...

Mon papa me disait : "on n'écrase par les fourmis, fils"

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Envoyé par Borislehachoir le Mercredi 02 Janvier 2013 à 12:42


Brick ( Rian Johnson, 2005 )

Brendan ( Joseph Gorodn-Lewitt ), jeune lycéen surdoué, est appelé à l’aide par son ex-copine Emily, qui se ravise peu après. Brendan découvre  plus tard le cadavre d’Emily abandonné et décide de rechercher la cause de sa mort.
Premier film de Rian " Looper " Johnson, ce Brick pourrait s’inscrire parmi un groupe de tentatives d’expérimenter autour du film pour adolescents, comme Donnie Darko ou Ghost World. Il partage d’ailleurs avec ces petites réussites une alternance entre l’excellent ( la course poursuite à pied avec un superbe travail sonore et une conclusion jouissive, le jeu sur les stéréotypes de film noir ) et l’énervant sur lequel je reviendrai dans quelques lignes.
L’histoire est très tordue et on a pu lire un peu partout que c’était une sorte de Dashiel Hammett dans un lycée US, là ou pour ma part j’ai plutôt pensé à Chandler - quoi qu’en disent certains, l’intrigue du Faucon Maltais est relativement claire -. Tout le projet du film consiste à jouer du décalage entre les personnages adolescents et leur environnement d’un côté, et des situations ou des caractéristiques directement reprises des polars violents des années 30-40 de l‘autre, ce qui produit une espèce d’exercice de style absolument atypique et forcément déroutant : les dialogues s’enchaînent à toute vitesse, le gothique du lycée est en fait le chef d’un réseau de trafic de drogue, l’actrice de théâtre est la salope wanna-be femme fatale de service tandis que Joseph Gordon-Lewitt incarne ( très bien ) une version junior d’Humphrey Bogart, partageant notamment l’incroyable capacité qu’avait son personnage de Marlowe à se faire casser la gueule tout le temps sans pour autant en sembler bien affecté.
Pour moi, le problème est qu’à citer des classiques du polar tout le temps, très vite le film tourne court et les deux scènes de suspens ( celle ou un maître chanteur dénonce Gordon-Lewitt et le final avec la révélation du coupable ) sont terriblement prévisibles pour peu qu’on se rappelle de ses classiques. Le film a malheureusement tendance à rester un peu en surface de ses références et le fait qu’on demeure à mi-chemin entre hommage et parodie fait que Johnson peine à trouver le ton juste. De plus, le film est assez dénué d’émotion pendant la quasi-totalité de sa durée, jusqu’à ce que la toute fin, pourtant ultra référentielle, vienne apporter un gros supplément d’âme bienvenu et réussisse à conclure ce film brillant mais très inégal sur une note positive. Des années avant Looper, Johnson se révélait déjà un cinéaste très prometteur.









Jesse James contre Frankenstein ( William Beaudine, 1966 )

Jesse James ( John Lupton ), le célèbre bandit de l’ouest, survit à un guet-apens durant lequel son meilleur ami est blessé. Il le conduit chez une médecin sans savoir que celle-ci est la petite-fille du célèbre docteur Frankenstein.
Bon bon bon. En dépit de ma petite expérience en matière de films de monstres plus ou moins réussis c’est le premier mélange avec le western que je peux voir, bien que le réalisateur ait également signé un Billy the kid contre Dracula. Non le gros problème c’est qu’il n’y a ni Jesse James ni Frankenstein dans ce film ; enfin, il y a un Jesse James sauf qu’il n’a tellement aucun point commun avec le bandit qu’on aurait pu l’appeler Joe Dalton ou Ike Clanton que ça n’aurait strictement rien changé. Quant à la magnifique histoire des descendants Frankenstein émigrés aux USA, on aura droit à une simli-créature bidon qui doit apparaît environ une minute 27 tout à la fin du film ( le record restant détenu par la créature dans La Maison de Dracula, qui devait apparaître 14 secondes au total, mais je m’égare ).
Bref, le film est composé de deux types de séquences. Dans le premier, Jesse James joué par un John Lupton s’emmerdant copieusement s’enfuit avec son ami entre deux scènes d’action toutes molles et des passages de romances absolument désespérants de platitude. Le second consiste à voir les deux descendants Frankenstein expliquer en plan fixe ce qu’ils comptent faire - mais aussi ce qu’ils ont fait, car après tout pourquoi gaspiller de l’argent à nous le montrer quand une sympathique conversation de dix minutes peut le faire tout en nous endormant ? -.
Parce que c’est le problème : il n’y a pas un rond dans ce film. Le décor de la baraque des Frankensteins prête à rire, les paysages sont des toiles peintes extrêmement visibles. Le doublage français pousse d'ailleurs l'amateurisme a un stade assez rare : il y a environ quinze secondes dans le film qui ne sont même pas doublées, on voit bien les conséquences des 35 heures. Et si des cinéastes ont montré qu'on pouvait obtenir des grandes choses avec un budget dérisoire ( Joseph lewis, Boetticher, Edgar Ulmer... ) ici le véteran du muet William Beaudine est incapable de livrer autre chose qu'un film idiot et même pas assez drôle pour étouffer les baillements du spectateur. Sans grand intérêt.

L’Homme qui rétrécit ( Jack Arnold, 1957 )

Après avoir été infecté par un brouillard radioactif, Scott ( Grant Williams ) découvre qu’il ne cesse de rapetisser. En dépit d’expériences médicales, Scott devient un phénomène de foire et ses relations avec sa femme ne cessent de se détériorer. Cependant, Scott va bientôt découvrir que d’autres dangers rôdent dans une maison.
Incroyable film fantastique produit par la Universal, l’Homme qui rétrécit est clairement l’idéal de ce que pouvait obtenir un cinéaste avec ce point de départ. On pourrait diviser le film en trois temps ; d’abord, la découverte du syndrome, les tentatives de lutte et l’isolement psychologique du personnage principal. Le deuxième temps, qui voit Scott échapper totalement à la vue de son entourage, est entièrement construit autour de deux énormes moments de bravoure : l’attaque du chat domestique alors que Scott est caché dans la maison de poupées, et plus tard les longs préparatifs conduisant à la lutte contre l’araignée ( rappelons que Jack Arnold avait réalisé deux ans auparavant Tarantula ! , aux yeux de beaucoup le meilleur film mettant en scène une araignée géante : l’intelligence de la mise en scène d’Arnold consiste dans ces deux cas à filmer de vraies araignées en très gros plan et par des jeux de montage et de perspectives à nous donner l’impression qu’elles côtoient le héros ; cet effet est absolument brillant ). Enfin, le troisième temps qui ne correspond qu’aux toutes dernières minutes du film est de loin le plus surprenant : il opère une sorte de glissement métaphysique autour de la question de l’infini et sort totalement du cadre de divertissement fantastique. Peu client de ce type de conclusions habituellement, j’ai été ici bluffé par le mélange de pessimisme foncier et de poésie qu’elle amenait.
Un des nombreux points forts du film réside dans l’extraordinaire utilisation des éléments du quotidien. La lampe ( contre le chat ) ou la paire de ciseaux ( contre l’araignée ) deviennent autant d’armes de fortune dont Scott se sert contre des ennemis physiquement avantagés. Rarement le décor n’a été aussi intelligemment employé dans un film.
L’homme qui rétrécit serait un chef d’œuvre si je ne trouvais pas le jeu de Grant Williams franchement limité. En l’état, cela reste un très grand film fantastique et sans doute parmi les 3-4 œuvres les plus marquantes du genre au sein des studios Universal aux côtés des deux Frankenstein de James Whale.








De l’or en barre ( Charles Crichton, 1951 )

Holland ( Alec Guiness ) est aux yeux du monde un transporteur de fonds dénué d’imagination et terriblement banal. Pourtant, Holland s’est associé avec un vendeur de statuettes, Pendlebury, et avec deux petits voleurs. Le plan d’Holland est de voler les lingots d’or de sa société, de les faire fondre et d’en faire des tours Eiffel miniatures qui pourront facilement passer la frontière.
Cette comédie Ealing est pour ma part une déception et au sein des œuvres du studio anglais, je la place bien en-dessous des satires de Cavalcanti ( Went the day well ? ) ou McKendrick ( L’Homme au complet blanc ), sans parler du chef d’œuvre du genre, le merveilleux Noblesse Oblige de Robert Hamer. En comparaison, De l’or en barre semble bien terne, bien gentillet et à une belle séquence près ( celle ou Alec Guiness et son associé gravissent à toute vitesse les marches de la vraie tour Eiffel ) bien avare d’audaces visuelles. Là ou les meilleurs réalisateurs Ealing avaient su caricaturer les tares de leur société, ici la conclusion apparaît conservatrice et sans éclat. Alec Guiness est bon mais pas à la hauteur de ses meilleures interprétations et les seconds rôles sont fades. Enfin, les derniers retournements de situation sont particulièrement mal amenés.
Pour autant De l’or en barre n’est pas dénué de charme et se regarde avec plaisir. Quelques gags par ci par là ( la vieille lectrice de polar qui ne parle plus qu’une sorte d’argot américain, le policier chantant, la rencontre entre les deux voleurs ) font mouche. On ne s’ennuie pas et à peine commence t-on à se lasser d’une situation que la machine se relance, De l’or en barre possédant son lot de poursuites effrénées et d’échappées à la police. Certains points auraient pu être formidables si le scénario avait su mieux les prendre en compte, notamment le double jeu d’Alec Guiness - sorte d’expert-comptable en encore moins fantaisiste aux yeux des gens qui le fréquentent mais pourtant cerveau de l'entreprise criminelle - ou les relations entre les quatre voleurs. On a du coup l’impression de voir un film qui respecte parfaitement le cahier des charges du bon film de casse qui se respecte, de facture tout à fait correcte quant à sa mise en scène et son interprétation mais qui ne réussit jamais à devenir quelque chose de mémorable. Dommage, mais heureusement le studio donna également lieu à des œuvres bien plus convaincantes.

Duch, le maître des forges de l’enfer ( Rithy Panh, 2011 )

Kaing Guev Eav, alias Duch, était le responsable khmer du centre S21 auquel Rithy Panh avait déjà consacré un documentaire ( S21 ou la machine de mort khmer rouge ). Ici Duch s’exprime assez longuement sur son engagement, ses convictions communistes et le système khmer.
Duch est certainement l’une des plus ignobles ordures de toute l’histoire de l’humanité et on peut être gré au réalisateur de ne pas avoir surligné ça ( ni voix-off ni gros effets de montage, le discours de Duch suffit largement à l’écoeurement ) et d’avoir laissé l’homme s’exprimer, d’autant plus que Duch est un très bon orateur. Il faut dire que l’homme semble jouir d’une intelligence prodigieuse ( son visage a beau être ravagé par des années de prison, son regard et son sourire sont encore ceux d’un homme intellectuellement brillant ), cite des œuvres littéraires comme alfred de Vigny, évoque sa vision particulière du marxisme puis du catholicisme ( Duch s’est converti en prison à la seule religion selon lui susceptible de lui pardonner ses crimes ) et finissant même certaines de ses phrases dans un impeccable français, comme ce terrible " le véritable amour du peuple, c‘est de lui donner la possibilité d‘exercer la dictature ". Fascination du mal.
Pour Duch comme pour le régime khmer, la révolution devait instaurer un ordre nouveau nécessitant une totale extermination de tout ce qui incarnait directement ou indirectement l’ancien système : bourgeois, capitalistes, impérialistes, professeurs non affiliés au marxisme… " Mieux vaut arrêter dix personnes qu’en libérer une par erreur " prétend Duch. Cela explique bien des choses.
Le système khmer avait pour particularité d’être sans doute le système totalitaire le plus bureaucratique : les rapports s’échangent de tous les côtés, les instructions se croisent et Duch justifie des actes qu’il dit regretter ( avoir laisser son ancienne institutrice se faire violer en prison par exemple ) par la peur que le système se débarrasse de lui. Duch est souvent ironique sur les valeurs qu’il a défendu mais ne peut s’empêcher de se vanter d’avoir été l’un des agents les plus efficaces du système. Même son rapport aux femmes n’échappe pas à l’idéologie : pour Duch, une jolie femme signifie le sexe - donc la distraction - tandis qu’une femme fortement bâtie est une potentielle recrue dans une optique révolutionnaire. Il conclue en citant Marx : rien n’échappe aux rapports de classe.
Un immense documentaire doublé d’un incroyable portait. Comme Into the abyss, on n’en sort pas indemne.









Boris, j'ai vu trois films en salles qui étaient tous franchement mauvais, je développerai plus tard mais là je me content de les déconseiller : L'Odyssée de Pi, Jack Reacher et Possédée.

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Weeds

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Envoyé par Weeds le Mercredi 02 Janvier 2013 à 13:25


 Tiens, j'ai vu Jack Reacher samedi (c'était ça ou The Hobbit 3D et j'avais ni envie de me flinguer les yeux ni envie de payer plus cher) et je confirme la mauvaise impression de Boris. En effet je n'ai pas trouvé de réel intérêt au film et même si certaines répliques de Tom Cruise peuvent donner le sourire ça ne va pas beaucoup plus loin.

Et puis ça donne surtout l'impression de voir un film ou un épisode de série télé au cinéma.

Weeds.

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