Borislehachoir  Hors Ligne Membre Passif depuis le 04/04/2024
Grade : [Nomade]  Inscrit le 23/04/2004 7421 Messages/ 0 Contributions/ 0 Pts | Envoyé par Borislehachoir le Lundi 19 Septembre 2011 à 18:17
La vie de Boris, chapitre 62 : présentation
- Si on recevait un euro par connerie entendue depuis le début du cours, y aurait de quoi nous payer à tous les deux les blu-ray Star Wars.
Celui qui rale, forcément, c'est moi : Boris, pour vous servir, mais légèrement amorphe durant son option de culture générale.
- Ah parce que t'écoutes encore les conneries qu'ils racontent toi ?
Le pragmatique à ma gauche, c'est Wollowitz. Depuis quelques années, le destin nous réunit invariablement dans la même promotion, en dépit de nos efforts cumulés pour partir dans d'autres directions. A l'instar de Castor et Pollux, d'Oreste et Pylade ou d'Enjolras et Grantaire, notre duo complémentaire est devenu au fil du temps parfaitement rodé et nous sommes désormais les numéros 1 de la catégorie " vous aimez les détester ". Pour le décrire, Wollowitz est portugais, de taille moyenne, barbu, maigre quoique musclé aux bras et doté d'un sourire assez ravageur qui, allié à ses techniques de drague légendaires, en fait l'un des plus grands séducteurs que je connaisse.
- Ce qui compte pour moi : réussir ma carrière professionelle mais aussi ma vie personelle, rester fidèle à mes valeurs et acquérir d'avantage de culture générale....
Et ça, là, c'est ce qu'on subit depuis une heure : la présentation requise par le prof de nos compagnons d'option culture générale. C'est à celui qui sera le plus conformiste et enchainera les banalités les plus déprimantes.
- J'espère que cette option me permettra de confronter différents points de vue. Ma devise : il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis.
Wollowitz est ouvertement en train de se marrer pendant que les gens parlent, et même si nous sommes comme d'habitude au dernier rang, je lui demande de faire un effort histoire qu'on ne se fasse pas virer tout de suite.
- J'ai donc une license d'histoire. L'important pour moi consiste dans la conciliation du travail et de la vie de famille. Mes loisirs sont la musique, la littérature et le cinéma. J'attends de cette option qu'elle m'ouvre des perspectives nouvelles, et ma devise est : qui ne tente rien n'a rien.
Je reluque vite fait la fiche de Wollowitz. La vache, il a bien préparé son lot de ronds de jambe. De manière général, Wollowitz joue un jeu assez particulier : il pousse le fayotage dans des contrées tellement lointaines qu'il en devient évident qu'il prend les profs pour des cons, mais ceux-ci semblent ne pas se poser de questions. Wollowitz traite les profs comme des femmes, c'est à dire des spectateurs idiots et apathiques de son show permanent.
- Hé, Boris, me souffle l'AES juste devant nous, tu vas encore péter l'ambiance ?
- Meuh non. Je suis un gars simple. Accueillant, sympathique, le coeur sur la main !
La première fois que j'ai rencontré cette fille, je lui ai demandé quel effet cela faisait de faire partie de cette grosse bande de cons que sont les AES. Curieusement, elle ne semble pas trop m'en vouloir et ne se tient pas à distance de ma tronche. Je ne comprends rien aux femmes.
- Hé, le polac, arrête de réver ça va être ton tour.
Merde. La promo me regarde. Je dois à mon tour faire mon speech pour expliquer à quel point je suis quelqu'un d'exceptionnel.
- Bonjour. Je m'appelle Boris Lehachoir, les deux sont mal orthographiés sur vos fiches. J'ai 23 ans, et je possède une maitrise de droit des affaires, puis comme les autres déchets de ma section j'ai bifurqué pour le grand centre de retraitement qu'est cet institut.
Les gens se marrent. Ils n'ont pas compris que j'étais tout à fait sérieux.
- Je me fous de réussir professionellement et si je termine caissier, tant pis. Je passe ma vie dans les salles de cinéma plutôt qu'à travailler, et je n'attends rien du tout de cette option, dans la mesure ou je trouve plutôt comique qu'on prétende nous inculquer une véritable culture générale en six mois...
- Pardon, me coupe le prof, mais on ne vous inculque rien du tout...
- Je suis tout à fait d'accord !
Re-gens qui se marrent. Je devrais utiliser un panneau sérieux/comique pour prévenir.
- Et comme je ne suis pas assez prétentieux pour avoir une devise ou quoi ce que ce soit de ce genre, je vous citerai un proverbe shadok : " il vaut mieux pomper et qu'il ne se passe rien que risquer qu'il se passe quelque chose pendant qu'on ne pompe pas ".
Là, c'est un gros four. Je croyais les shadoks plus populaires ; voilà bien là France de Scyth et de Pierre Bénichou !
Le prof fait signe de passer au suivant et soudainement, Wollowitz se lève :
- Si je me lève c'est afin que tout le monde puisse m'entendre afin de bien mesurer à quel point ma vie est inintéressante !
Là, je pressens que ça va partir en sucette.
- Car en effet, au milieu de tous ces gens formidables, merveilleux, extraordinaires, qui se sont présentés avant moi, j'ai peur de ne pas être à la hauteur : je ne pense qu'à ma gueule, le reste du monde peut crever, et j'ajoute que comme disait mon ancien professeur de droit fiscal, j'adore parler, mais je déteste vous écouter. En plus j'en ai marre de vous entendre répeter les mêmes discours formatés et prémachés !
Point positif : mon discours sera totalement oublié après le sien.
- Récemment je travaillais dans une societé ou j'avais 4 filles sous ma responsabilité, c'était bien, comme ça elles pouvaient me faire du café ! Sinon contrairement à ce que mon physique peut laisser penser, je suis musicien dans un groupe de death metal...
Là, il nous a fait une typologie des courants dans le metal. Sisi. Evidemment je n'ai rien pané.
- ... et pas ce que j'appelle du " metal environnemental " comme les groupes pourris style Gojira. Ah oui, je vous avais dit que ce serait pas intéressant !
Je lui chuchote " je confirme ", il entend et rigole.
- Euh, sinon, ma devise, c'est " éviter de mourir idiot ". Mon but dans la vie, c'est éviter de mourir idiot. Ce que j'attends de cette matière, c'est qu'elle m'évite de mourir idiot. Quant à mon âge.... je suis trop jeune pour mourir idiot !
Wollowitz se rassoit dans une ambiance mi-consternée mi-morte de rire. Le prof semble s'amuser de la situation et le moins qu'on puisse dire et que pour son premier jour à l'institut, Wollowitz a surement marqué quelques personnes.
Une demi-heure plus tard, alors que nous faisons la queue au restau U, je lui demande :
- Dis, ça fait un moment qu'on se connait, normalement les rôles sont répartis : je suis le connard, t'es le lover. Pourquoi t'as pété une durite en cours ?
- Justement, pour être le lover !
- Les deux tiers des filles de la promo ont du te ficher gros naze, hein.
- Pendant que tu parlais, j'ai regardé l'AES juste devant toi. Elle riait à tes blagues. Je me suis dit " merde, si Boris la fait rire, je dois pouvoir faire mieux ". En plus je suis plus beau. Donc j'ai envoyé chier tout le monde histoire qu'elle se dise " Waw, quel homme ce Wollowitz ! ".
- Attends, tu t'es mis toute la promo à dos dans l'espoir vague de sauter une nana casée juste parce qu'elle me souriait ?
- En gros, oui.
- Je t'aime bien, Wollowitz. A côté de toi j'ai l'air moins minable.
- Peut-être, mais j'ai du style.
Boris.
___________________
|